Oriane, the Artist (partie 2/2)
Y’a-t-il des sujets sur lesquels tu te censures ?
Je ne dirais pas que je me censure. Mais il y a certains sujets que je ne sais pas encore comment représenter. Par exemple, les enfants qui dansent incroyablement bien : impossible de les incarner aussi bien que ce que j’ai sous les yeux ! Ou les lavaka, ces énormes trous dans la montagne provoqués par des glissements de terrain : comment les représenter aussi grands et monstrueux qu’ils ne sont en vrai ? Lorsque la sensation provoquée est trop en décalage avec la réalité de la scène, c’est ce qui fait qu’elle est difficile à illustrer.
Pour d’autres sujets, je sais que je n’ai pas encore assez de recul pour les dessiner. Par exemple, la fracture entre le monde dans lequel on vit, nous Vazaha, et ce que l’on voit autour de nous. Je n’ai pas envie de faire quelque chose de trop simpliste, trop dans la critique ou trop édulcoré. Et il faut faire attention aux impressions : pour certaines, je sais que je peux les coucher immédiatement sur papier parce que leur portée est minime ; tandis que là, je suis encore en train d’assimiler cette situation, je ne sais pas comment prendre les choses.

Le fait de dessiner m’aide à prendre du recul sur ce que je vis ici, à faire la part des choses entre ce qui relève du ressenti ponctuel et ce que j’ai envie de partager et de garder.
Autre difficulté sur ce sujet de la fracture : QUOI représenter ?
On est témoin de plein de situations de misère ici, mais comment tu la représentes, sans tomber dans le cliché ou paraître condescendant ? Je n’ai pas envie de tout mettre sur le même plan. Je ne veux surtout pas être dans la caricature ou faire des dessins qui n’évoqueraient pas mon vécu ici.
J’ai l’impression de marcher en permanence sur une ligne à la frontière entre deux mondes extrêmes : certains jours, ça va, tu te détaches un peu ; d’autres, moins et tu te prends tout en pleine tronche.
C’est fou l’évolution de style entre tes premiers dessins et aujourd’hui. Et tout est si bien structuré, il n’y a pas une seule rature ! Comment fais-tu pour « construire » tes pages ?
C’est un subterfuge ! (rires) En fait, il n’y a pas forcément de construction. En général, les éléments représentés sur une même page sont souvent liés mais je ne sais pas à l’avance à quoi va ressembler l’ensemble. Je commence par un truc et après je vois, en fonction de la place que j’ai. Ça donne des pages un peu « foutoirs », comme celle de la vie quotidienne ; et d’autres un peu plus réfléchies, comme celle du riz.
Mes premières pages étaient plus anarchiques : je faisais beaucoup de remplissage, j’avais la phobie de l’espace vide ! Au fur et à mesure des dessins, une logique s’est créée et affinée. Avec l’habitude peut-être, je visualise plus rapidement à quoi va ressembler la page. Mais j’essaie vraiment de me tenir à la règle que je me suis fixée en commençant à dessiner : ne pas trop s’attarder sur le côté esthétique et réfléchi pour laisser de la place au spontané et pouvoir dessiner tout ce qui m’arrive. Et il y a des ratures, mais tu ne les vois pas ! Notamment sur l’écriture des mots : quand je dessine, je mets un peu mon cerveau sur « pause », du coup j’oublie des lettres. Par exemple, sur la page du baobab, le mot « polystyrène » est complètement raturé !
D’un point de vue plus global, le dessin, pour toi, c’est quoi ? Qu’est-ce que cela t’apporte ?
Je dessine depuis toute petite, ça a toujours été assez instinctif. Ma mère ne sortait jamais avec moi sans une feuille et un crayon et je pouvais passer l’après-midi tranquille : pratique ! Au lycée, c’est devenu un moyen d’expression, un exutoire. Je faisais beaucoup de caricatures, de mes profs par exemple. Je faisais un peu ma maligne avec ça, d’ailleurs ! Je savais que j’étais douée là-dedans donc j’en profitais un peu, c’était mon outil de popularité. (rires)
Petit à petit, j’ai de moins en moins dessiné. Je ne faisais plus que des choses « belles », moins de gribouillis et de trucs instinctifs. Je crois aussi que j’étais frustrée de ne pas pouvoir dessiner autant que je l’aurais voulu, de ne pas pouvoir en faire mon métier. Mais j’ai fini par me rendre compte que c’était dommage d’arrêter et, surtout, que j’en avais besoin : aujourd’hui, c’est toujours un exutoire mais j’essaie de réapprendre la spontanéité sans forcément me dire que je vais faire une œuvre d’art !
Mon carnet s’inscrit totalement dans cette réflexion : en plus, je dessine au stylo, donc je ne passe pas 10 ans à gommer et recommencer ; et je n’ai qu’un carnet, donc tout ce qui y est y reste. J’apprends à accepter de faire des trucs qui ne sont parfois pas terribles ! (rires) Mais tant pis, ça arrive, ça reste et ça fait partie du carnet. Je retrouve le plaisir de « faire », tout simplement. Ça stimule aussi ma créativité de manière générale, le fait d’écouter ce que je ressens et d’y donner une forme. Dessiner, c’est un exercice assez complet, je trouve : au-delà de « simplement » faire du bien, tout le processus qui se cache derrière est très bénéfique.
Et puis, je ne peux pas nier que ça me fait plaisir, les réactions positives quand je montre mon carnet : je retrouve un peu le côté « popularité » du collège (rires) ! Surtout qu’il n’avait pas vocation à être public. Alors quand je vois que les gens se reconnaissent dans mes dessins, ça me donne encore plus envie de continuer ! Et pour finir, ils me permettent de montrer à ma famille et mes amis ce que je vis ici et de créer du lien : finalement, je me rends compte qu’ils sont plus en attente de voir mes dessins plutôt que je leur envoie des photos !
Merci Oriane pour ce très chouette moment en compagnie de ton carnet ! On retrouve dans tes dessin ta passion, ta simplicité et ton humour alors, par pitié… Continue !
Vous en voulez-plus ?
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@oriane_delaporte
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